États-Unis: branle-bas de combat avant le coup de filet migratoire de Trump

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«Nous ne pouvons pas dire que nous ne savions pas.» Manifestation contre la politique migratoire de Donald Trump, le 13 juillet 2019 à Paris.Nuccio DiNuzzo/Getty Images/AFP

Une vaste opération d’expulsion d’immigrés clandestins et de leurs familles est prévue ce dimanche 14 juillet 2019 aux États-Unis. Une mesure « coup de poing » de l’administration Trump, qui avait été repoussée au dernier moment le mois dernier. Certains parlent de « rafles ». À quoi faut-il s’attendre ?

La police américaine de l’immigration (ICE) a obtenu des ordres d’expulsion pour environ un million de personnes, rapporte notre correspondant à New York, Grégoire Pourtier. Mais cela fait beaucoup trop de monde pour envisager que tout se fasse en une seule fois. Il semble donc qu’au moins 2 000 sans-papiers seront visées dans un premier temps, dans une dizaine de villes à travers le pays.

Comment ces arrestations vont-elles se dérouler ? L’ICE va-t-elle effectivement s’attaquer à des membres de gangs ? Comment va-t-elle se comporter si de jeunes enfants sont concernés ? Prévenus de la date précise par Donald Trump lui-même, les clandestins ont en tout cas pu prendre des mesures, que ce soit en quittant leur lieu de résidence ou en étant informés précisément de leurs droits.

Le battage médiatique semble surtout destiné à la base électorale de M. Trump, électrisée par la question de l’immigration clandestine. Pour l’administration, afficher ainsi fermeté et détermination ressemble aussi à une fuite en avant. Les séparations de familles de migrants avaient fait scandale, et les conditions de vie dans les camps de détention sont jugées inhumaines par l’opposition.

Les consuls mexicains mobilisés pour faire face aux situations indivduelles

Le pouvoir ne se démonte pas et estime que c’est en raison du laxisme des démocrates et de leur incapacité à légiférer que l’on en est là. Mais de nombreuses manifestations ont eu lieu ces derniers jours pour dénoncer des « camps de concentration ». Les cinquante consulats du Mexique aux États-Unis sont en l’état d’alerte, comme le gouvernement mexicain.

Mexico a déployé une stratégie visant à intensifier les mesures d’assistance et de protection consulaire en faveur de ses ressortissants qui seraient détenus ou menacés d’expulsion aux États-Unis. A été lancée dans un premier temps une campagne d’information destinée aux migrants, et le gouvernement mexicain a mis à leur disposition un fond de contingence de deux millions de dollars.

Les consuls cherchent à informer les sans-papiers sur l’existence de numéros d’urgence, sur la manière d’agir en cas de descente des agents migratoires – ne pas ouvrir la porte par exemple – et sur les droits des personnes arrêtées, avoir un interprète ou pouvoir communiquer immédiatement avec le consulat par exemple. Il est suggéré de désigner un tuteur au cas où les familles seraient séparées.

Il faut savoir que les agents de la police de l’immigration attendent des fois devant les maisons et tentent d’arrêter les personnes lorsqu’elles sortent. Les gens sont vraiment angoissés, nous leur conseillons de ne pas paniquer et de connaitre leurs droits. Si un agent de la police de l’immigration frappe à la porte, il ne faut pas lui ouvrir. Il faut garder le silence, ne surtout pas donner d’informations personnelles à l’un de ces agents. Il faut prévenir la famille. Mais la chose la plus importante, c’est vraiment de ne pas ouvrir la porte! Car les agents arrivent avec un mandat d’arrêt de la police de l’immigration, ce ne sont pas des mandats classiques signés par un juge. Cela veut dire qu’ils n’ont pas le droit de pénétrer dans la maison par la forceThomas Kennedy, de l’ONG Florida Immigrants Coalition.

Des ONG établissent des abris secrets pour que les migrants clandestins

Pour atteindre le plus grand nombre, les consulats mexicains ont diffusé ces informations sur les réseaux sociaux et dans les médias hispaniques. Ils ont également multiplié les rencontres avec les sans-papiers, ainsi que les visites dans des centres de détention. L’objectif consiste à recenser les familles mexicaines qui s’y trouvent, explique notre correspondant à Mexico, Patrick John Buffe.

Les personnes visées par les autorités américaines sont celles qui ne se sont pas présentées à des audiences devant des tribunaux ou qui ont reçu des avis d’expulsion. Le réseau consulaire a créé un groupe de 400 avocats au service des migrants qui pourraient être arrêtés. Les organisations de défense des immigrants sont sur le qui-vive, elles organisent des abris secrets pour les gens concernés.

C’est le cas de l’ONG Florida Immigrants Coalition, dont le coordinateur politique Thomas Kennedy décrit l’ambiance chez les sans-papiers : « Je ne dirais pas qu’ils sont en panique, mais ils ont peur. Les personnes concernées par les raids ont peur de rester à la maison ; peur qu’on vienne frapper à leur porte. Elles décident soit de ne pas sortir pendant les prochains jours, soit de quitter la ville. »