Le président élu des Etats-Unis, Donald Trump, dévoile encore un peu plus ses priorités dimanche dans une première grande interview télévisée, au lendemain de manifestations le contestant dans plusieurs grandes villes américaines, devenues quotidiennes depuis son élection mardi. Parmi elles, son souhait formulé d’expulser jusqu’à 3 millions d’immigrés clandestins.
« Ce que nous allons faire, c’est prendre les gens qui sont des criminels et qui ont des casiers judiciaires, qui appartiennent à des gangs, qui sont des trafiquants de drogue (…), sans doute 2 millions, ça peut aussi être 3 millions (de personnes), nous allons les renvoyer du pays ou nous allons les mettre en prison. Mais nous allons les renvoyer de notre pays, ils sont ici illégalement. »
Après une interview au quotidien Wall Street Journal, le magnat de l’immobilier expliquera ce qu’il compte faire pour l’Amérique dans sa première intervention télévisée sur la chaîne CBS dans la célèbre émission « 60 minutes ».
Selon des extraits de cet entretien réalisé vendredi et distillés par la chaîne, il redit qu’il compte garder certains pans de la loi sur la réforme de l’assurance santé Obamacare. Mais sa directrice de campagne, Kellyanne Conway, a suggéré sur Fox dimanche que la loi serait proprement « abrogée ».
Donald Trump explique aussi qu’il continuera à communiquer sur le réseau social Twitter, qui l’a « aidé » à remporter l’élection, mais plus modérément que pendant la campagne.
Reste à savoir si Trump dévoilera le nom tant attendu de son futur « chief of staff », le puissant secrétaire général de la Maison Blanche, qui orchestrera toute l’administration du nouveau président populiste.
Kellyanne Conway a promis samedi une annonce « imminente » pour ce poste, confirmant que le président du parti républicain, Reince Priebus, faisait partie des candidats.
Un autre prétendant cité à cette fonction est le patron de sa campagne et chef du site d’informations Breitbart News, Stephen Bannon, avec lequel la député française d’extrême-droite Marion Maréchal-Le Pen, nièce de la présidente du Front national, a dit samedi avoir l’intention de travailler.
Les Américains reconnaissent l’élection
Des dizaines de milliers de manifestants ont encore arpenté les rues de plusieurs grandes villes américaines samedi, plus de 10.000 à New York et autant à Los Angeles, plusieurs milliers à Chicago.
Epingle à nourrice à la poitrine, devenue symbole de soutien aux minorités attaquées par le candidat républicain pendant la campagne, ils expriment leurs craintes d’une poussée de xénophonie dans tout le pays.
« J’ai des amies musulmanes qui ont peur de mettre un foulard », a raconté Nadia Sisneros, une immigrée mexicaine de 29 ans, manager de restaurant.
Pourtant, selon un sondage ABC News/Washington Post, 74% des Américains jugent légitime l’élection de Donald Trump, avec des variations fortes selon les camps politiques: 99% des partisans du nouveau président reconnaissent l’élection, mais seulement 58% des partisans de sa rivale, Hillary Clinton.
Les regards restaient tournés dimanche vers la tour Trump à New York, dans laquelle le président élu passe le week-end pour préparer son futur gouvernement.
« Il reçoit beaucoup de visiteurs », a reconnu Mme Conway.
Parmi ces derniers figuraient samedi Nigel Farage, président du parti europhobe et anti-immigrés Ukip, qui a soutenu le vote britannique en faveur d’une sortie du Royame-Uni de l’Union européenne (Brexit).
« C’est un homme avec qui nous pouvons faire affaire », a déclaré M. Farage, selon un communiqué de l’Ukip.
Le réalisateur de cinéma Michael Moore, critique de Donald Trump, est entré samedi dans la tour pour tenter d’y rencontrer le président élu, en vain.
Le mur, ‘super outil de campagne’
Poursuivi en justice pour des fraudes supposées de son université éponyme, Donald Trump a demandé par l’intermédiaire de ses avocats le report du procès, qui doit normalement démarrer le 28 novembre.
Ses avocats ont expliqué que le futur président devait préparer sa prise de fonction et serait désavantagé s’il ne pouvait témoigner en personne.
Après une campagne très virulente, le milliardaire a semblé assouplir ses positions dans son interview au WSJ.
Outre son voeu d’amender Obamacare, il a aussi affirmé qu’enquêter sur sa rivale Hillary Clinton n’était pas sa priorité. Pendant la campagne il a pourtant répété que la démocrate méritait d’aller « en prison » pour avoir utilisé un serveur privé pour ses emails quand elle était chef de la diplomatie.
« Ce n’est pas une chose à laquelle j’ai beaucoup réfléchi », a déclaré au WSJ Donald Trump.
L’ancien chef de la Chambre des représentants, Newt Gingrich, cité au poste de secrétaire d’Etat, a pour sa part suggéré que le mur promis par Trump à la frontière mexicaine pour limiter l’immigration ne serait probablement pas financé par le Mexique mais que « c’était un super outil de campagne ».
Dans un tweet samedi, Donald Trump a appelé les Américains à s’unir, quand les manifestants craignent que son élection n’exacerbe les tensions raciales dans le pays.
L’organisation américaine de défense des droits civiques SPLC (Southern Poverty Law Center) a recensé sur son site internet 200 incidents à caractère raciste depuis l’élection de Trump mardi.
Des dizaines de personnes ont prévu sur Facebook de participer à une « Marche des femmes » à Washington le 21 janvier, soit le lendemain de l’investiture du nouveau président.