Au terme d’une crise électorale qui dure depuis octobre 2015, Jovenel Moïse a été confirmé mardi président élu de la République d’Haïti. Il se retrouve à la tête d’un État politiquement et socialement divisé, aux finances exsangues.
L’interminable crise électorale haïtienne a finalement pris fin mardi 3 janvier : Jovenel Moïse, confirmé président élu avec 55,60 % des suffrages au scrutin du 20 novembre, se retrouve à la tête d’un État politiquement et socialement divisé, aux finances exsangues. À 48 ans, le candidat du parti Tet Kale (PHTK), qui entamera sa carrière politique en occupant la plus haute fonction publique, a conscience des divisions profondes minant le développement du pays.
« On a voté pour un chemin vers la vie meilleure pour tous les Haïtiens : ceux des montagnes comme ceux des plaines, ceux de la province et ceux de la ville, ceux de la diaspora et ceux qui vivent au pays, ceux qui ont la peau claire et ceux qui ont la peau noire, ceux qui sont riches et ceux qui sont pauvres », a énuméré Jovenel Moïse mardi soir lors d’un discours dans un hôtel de luxe de la capitale devant des partisans.
Plus de 200 ans après son indépendance, la première république noire de l’Histoire est classée par la Banque mondiale comme l’un des pays les plus inégalitaires de la planète.
La richesse possédée par l’élite économique, métisse et d’origine syro-libanaise, contraste avec l’extrême pauvreté du reste de la population : près de 60 % des Haïtiens vivent avec moins de deux dollars par jour.
Ce clivage a été dénoncé durant la campagne par les sympathisants des principaux concurrents de Jovenel Moïse : habitant les quartiers les plus pauvres de la capitale, ils n’ont cessé d’accuser le candidat du PHTK de ne vouloir défendre que les intérêts de l’élite bourgeoise.
S’adressant aux autres candidats à la présidentielle, Jovenel Moïse a expliqué avoir « besoin de (leurs) expériences, (leurs) compétences et (leur) dévouement pour qu’on travaille ensemble pour que chaque Haïtien ait à manger dans son assiette et de l’argent dans sa poche ».
Seuls 21 % des Haïtiens ont voté
Cet appel à l’union politique devrait se heurter à l’opposition sans concession des candidats qui ont légalement contesté sa victoire.
Depuis la première tenue du scrutin présidentiel en octobre 2015, annulé par la suite en raison de fraudes massives, Jude Célestin (arrivé deuxième avec 19,57 % des suffrages, selon les résultats publiés mardi), Moïse Jean-Charles (11,04 %) et Maryse Narcisse (9,01 %) nient la possibilité d’une victoire de Jovenel Moïse et l’ont toujours considérée comme « un coup d’État électoral ».
Répétant vouloir « rétablir l’ordre et la discipline », le future 58e président du pays a annoncé qu’il débuterait son mandat le 7 février, en lançant « les États généraux sectoriels de la Nation », minimisant l’extrême désintérêt de la population pour la chose politique : seuls 21 % des Haïtiens ont voté à l’élection présidentielle.
La majorité des citoyens ne croit plus aux promesses des politiciens et les idées de réformes, seulement esquissées par Jovenel Moïse, vont se heurter aux graves difficultés économiques de l’État : la dette haïtienne s’élève aujourd’hui à plus de 2 milliards de dollars et, faute d’investissements publics comme privés, la croissance ne devrait pas dépasser 1 % en 2017.
Avec AFP