Vidéo : enfermé vivant dans un cercueil par des fermiers blancs, le supplice d’un Noir sud-africain

Une vidéo amateur scandalise depuis plusieurs jours l’Afrique du Sud : on y voit deux hommes blancs enfermer un homme noir dans un cercueil et le menacer de mort à plusieurs reprises. La scène fait rejaillir les tensions racistes, particulièrement importantes dans le milieu agricole sud-africain.

Selon les médias sud-africains, la vidéo a été filmée le 17 août au sud du pays, dans la province du Cap-Oriental, près de la ville de Middelburg, dans une exploitation agricole du nom de »JM de Beer Boerdery ». Mais elle n’a commencé à circuler que la semaine dernière, à l’approche du procès.

On y voit un homme blanc avec une casquette, qui force un jeune homme noir à rentrer dans un cercueil et à le refermer. La victime gémit, pendant que ses deux agresseurs lui conseillent de coopérer, menaçant sinon de jeter un serpent dans le cercueil ou d’y mettre feu.

Peu d’informations ont filtré sur ce qu’il s’est passé après cette scène, mais l’homme a en tout cas été libéré et a porté plainte. Selon des médias sud-africains, les agresseurs auraient expliqué s’en être pris au jeune homme car il aurait « envahi un terrain » agricole qui leur appartenait. Une version niée par la victime, qui a affirmé mercredi qu’il « prenait simplement un chemin qui traverse une ferme pour se rendre à son township » lorsqu’il a été attaqué.

Une récupération politique de l’incident ?

L’incident a pris une tournure politique depuis quelques jours : le parti d’extrême gauche panafricaniste Les Combattants pour la liberté économique (EFF) s’est porté partie civile au procès des deux hommes. Un de ses leaders a expliqué : “cet incident prouve encore une fois la place actuelle des Noirs dans la société sud-africaine”. Des manifestations ont eu lieu devant le palais de justice de Middleburg où les deux fermiers devaient être entendus mercredi.
Mais dans le même temps, le Congrès national africain (ANC), le parti historique de Nelson Mandela, tente également de récupérer politiquement l’incident en affichant ses leaders avec la victime. Gaopalelwe Olivia Phalaetsile, une journaliste pour la radio Jacaranda News, était à la cour de justice de Middleburg :

C’était très surprenant de voir dans la rue, à côté du tribunal, d’un côté un stand de l’EFF, et de l’autre, un stand de l’ANC, où la victime allait prendre successivement la parole. Du côté de l’ANC, on lui a même fait enfiler un costume traditionnel sud-africain aux couleurs de l’ANC pour bien montrer qu’il était des leurs [le jeune homme est militant de l’ANC, Ndlr].

© Gaopalelwe Olivia Phalaetsile, Jacaranda News

Sur la photo, la jeune victime, avec les mains devant la bouche, a enfilé un costume traditionnel de l’ANC. Photo Jacaranda News.

Cette récupération politique est très regrettable, car on ne se concentre plus sur l’essentiel : ce qu’a enduré ce jeune homme.

Le procès a finalement été ajourné au 25 janvier prochain et les deux fermiers blancs resteront en détention jusqu’à cette date. Ils ont fait une brève apparition au tribunal et ont affirmé avoir abandonné leur bail car ils craignaient pour leur vie, selon un journaliste qui a assisté au procès. Ils sont accusés de tentative d’agression avec intention de blesser gravement.

Des incidents réguliers dans le milieu agricole

Dans le milieu agricole sud-africain, les tensions entre fermiers blancs et noirs ne sont pas rares. Depuis 1994 et la fin de l’apartheid, les gouvernements successifs se sont lancés dans des politiques de redistribution des terres arables, détenues à 87 % par des fermiers blancs. Cette politique n’a que très peu eu d’effets, puisque seulement 8 % des terres ont été redistribuées en 20 ans.

Pire : les attaques de fermes, détenues par des Blancs comme par des Noirs, se sont multipliées en 2015, année durant laquelle 33 fermiers sont morts.